Alors que la sécurité routière reste un enjeu majeur en France, les députés ont relancé l’initiative visant à instaurer une qualification pénale spécifique : celle d’« homicide routier ». Une avancée symbolique pour certains, mais essentielle selon ses promoteurs pour mieux reconnaître la gravité de certains drames de la route. Le texte doit désormais repasser par le Sénat pour finaliser son adoption.
Une nouvelle qualification pénale pour mieux nommer les faits
Mardi 3 mai, l’Assemblée nationale a adopté à une large majorité la proposition de loi portée par le député Les Républicains Éric Pauget et l’ancienne députée macroniste Anne Brugnera. Le texte vise à introduire dans le Code pénal les notions d’« homicides et blessures routiers », afin de mieux qualifier les cas où un conducteur cause la mort ou des blessures graves à autrui avec un véhicule à moteur. Il a été voté par 194 voix contre 6, bénéficiant du soutien du gouvernement.
« On sort du côté binaire « involontaire, volontaire » », a déclaré Éric Pauget à l’Assemblée. Le député souhaite une qualification plus juste, qui tienne compte de comportements délibérément dangereux : conduite sous alcool ou stupéfiants, rodéos urbains, vitesse excessive, etc. « Pour les familles, le terme juridique « homicide involontaire » est inacceptable lorsqu’il s’agit d’un comportement sciemment irresponsable », a-t-il insisté.
Cette nouvelle qualification ne modifie pas les peines prévues dans les textes actuels. Elle constitue toutefois un changement de terminologie jugé important par de nombreux parlementaires, tant sur le plan symbolique que judiciaire.
Une réforme à portée surtout symbolique, mais attendue
La proposition de loi avait déjà été adoptée en début d’année 2024 par l’Assemblée nationale et le Sénat, mais le processus avait été interrompu par la dissolution de l’Assemblée. Elle reprend donc aujourd’hui son parcours législatif. Si le Sénat la vote sans amendements, le texte pourra être définitivement entériné.
Pour la députée Horizons Béatrice Piron, cette réforme reste avant tout symbolique, puisque « les quantums de peines encourues restent inchangés ». Mais elle rappelle que « les symboles sont importants ». Le texte vise à rétablir une forme de confiance dans la justice, notamment auprès des familles de victimes. Une position partagée par le député socialiste Hervé Saulignac, qui y voit une manière de « réconcilier les citoyens avec l’institution judiciaire », perçue parfois comme trop clémente.
Tous les groupes politiques ne se sont toutefois pas ralliés à la réforme. Du côté de La France insoumise, certains élus ont voté contre ou se sont abstenus. Rodrigo Arenas a exprimé ses réserves : « Cette loi n’est pas demandée par les juges, ni par les avocats. Il serait hypocrite de faire croire aux familles que cette loi va arranger les choses. »
D’autres mesures répressives pour renforcer la sécurité routière
Le texte comprend également d’autres dispositions visant à renforcer la lutte contre les comportements dangereux au volant. Un nouvel article prévoit de criminaliser les excès de vitesse supérieurs à 50 km/h, sans attendre une éventuelle récidive. Cette infraction serait désormais passible de trois mois d’emprisonnement, 3 750 euros d’amende, et de peines complémentaires, telles que l’annulation du permis de conduire.
Par ailleurs, en cas d’homicide ou de blessures routiers, un examen médical obligatoire devra être effectué par l’auteur dans un délai de 72 heures (sauf contre-indication médicale). Cette mesure vise à évaluer son aptitude à la conduite, en intégrant un aspect préventif dans la réponse judiciaire.