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Candilib: la DSR à l’heure de la start-up nation

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Parmi les 23 mesures avancées par le rapport Dumas pour « augmenter l’accessibilité du permis de conduire », deux d’entre elles font l’objet d’une forte opposition. La première concerne l’inscription de la portée nationale de l’agrément dans le code de la route (proposition n°10). La seconde suggère de « désintermédier l’attribution des places de l’examen pratique en mettant en place un calendrier en ligne pour l’intégralité du territoire national, à l’instar de l’expérimentation en cours pour les candidats libres » (proposition n°19).

Le rapport dévoile l’existence d’un plateforme baptisée Candilib (dont l’identité visuelle et le nom rappellent Doctolib, une start-up spécialisée dans la prise de rendez-vous auprès des professionnels de santé).

Capture d’écran du site beta.gouv.fr

Candilib, une start-up d’État

Le projet est lancé par la DSR à l’été 2018, et une version beta est testée en Seine-Saint-Denis depuis le mois de juillet dernier. Il est confié à Philippe Bron (responsable Lab Innovation), Dominique Lequepeys (consultant chez Octo Technology, filiale d’Accenture) et Frédéric Gillodes (responsable de l’ETG à la DSR). La plateforme Candilib est listée comme « start-up d’État. »

Selon la description qu’en fait la DSR dans le rapport parlementaire, le fonctionnement est simple : « chaque candidat reçoit un mail avec son identifiant lui indiquant qu’il peut s’inscrire sur l’agenda. Il dispose d’un accès à l’intégralité des plages disponibles des examinateurs du permis de conduire dédiées aux candidats libres. Le candidat s’inscrit dans l’agenda et réserve ainsi son créneau. Il est libre de se présenter ou non. »

Des résultat toujours inférieurs à la moyenne

Le rapport Dumas détaille les résultats de l’expérimentation menée à Paris et en Seine-Saint-Denis de juillet à octobre 2018 (voir tableau ci-dessous).

Il ressort de ces chiffres que (1) sur 234 créneaux réservés seuls 211 candidats ont été examinés, soit 10% des candidats ne se sont pas présentés ou n’ont pu être examinés (véhicule non conforme, défaut de documents, autre…) et (2) que sur ces 234 candidats, seuls 105 ont été reçus, soit un taux de réussite inférieur à 45% (pour mémoire, les taux de réussite sur les départements 75 et 93 étaient respectivement de 49% et 57% en 2017).

Par ailleurs, les chiffres avancés par le rapport sont faussés dans la mesure où certaines auto-écoles, en manque de place d’examen, ont incité leurs élèves à se présenter sur Candilib. Sans ces élèves, il est à parier que le nombre de candidats reçus lors de l’expérimentation aurait été bien inférieur…

Des économies comme justification principale

Si, selon le rapport Dumas, « le premier bilan de l’expérimentation Candilib est positif », le principal argument en sa faveur semble être d’ordre financier. En effet, « la mise en place, au niveau national, à terme, d’une solution de désintermédiation complète aura pour effet de libérer une partie des 300 postes de répartiteurs (ETP). La mission estime que 150 équivalents temps plein (ETP) pourraient être redéployés sur des missions plus prioritaires au service de la sécurité routière. »

Candilib permettra-t-il au Ministère de l’Intérieur de faire des économies? Rien n’est moins sûr. Le taux de réussite des candidats libres étant inférieur de 15 points à la moyenne des candidats présentés en auto-école (chiffres du Bilan du permis de conduire 2017), si le modèle du candidat libre venait à se généraliser, le nombre d’examens devrait fortement augmenter… ainsi que le nombre d’IPCSR nécessaires pour les faire passer! À moins, bien sûr, que l’examen soit privatisé (ce qui est pour l’instant exclut du rapport Dumas) ou de fixer le prix de la représentation à un tarif supérieur à 61€ (prix de revient d’un examen pour le Ministère).

Une décision déjà actée?

Le rapport précise que « si la voie d’une désintermédiation pour l’ensemble des candidats (candidats libres ou présentés par une école de conduite) n’était in fine pas retenue ; pour la mission, il convient à tout le moins de généraliser l’applicatif « candilib » pour l’ensemble des candidats libres qui se présentent à l’épreuve pratique sur le territoire. ». La référence est limpide. Le rapport semble oublier la définition d’un « candidat libre », ce qui exclut de fait les candidats formés sur les auto-écoles en ligne, disposant d’un agrément.

Dès lors, il semble évident que la décision a été prise (avant même la rédaction du rapport) et que l’application sera généralisée – sous une forme ou sous une autre – et seul son périmètre reste à définir. Plusieurs éléments tendent à aller dans ce sens:

  • Candilib est listée parmi les « start-up en accélération » sur beta.gouv.fr ;
  • Les noms de domaine candilib.fr et candilib.com ont été réservés (en vue d’une prochaine mise en ligne?) ;
  • Selon nos informations, une réunion a eue lieu le 4 février (avant même la remise du rapport parlementaire) à la DSR au sujet de Candilib. Cette réunion avait pour objet les améliorations à apporter à la plateforme en vue d’une extension de l’expérimentation à d’autres départements. Le directeur technique d’Ornikar, Alexandre Barreira, était présent à cette réunion.

Un fiasco programmé

La généralisation de Candilib, si elle semble inévitable, risque de poser des défis considérables. En effet, l’ensemble des candidats en cours de formation vont vouloir s’inscrire à l’examen dès la mise en place du système (certains avant même d’avoir effectué 20 heures de conduite), et le système risque de se retrouver très vite saturé.

Des phénomènes similaires à ceux constatés avec la privatisation de l’ETG vont voir le jour : certains candidats réserveront une place d’examen « pour voir ». Ils se présenteront sans leur dossier, sans accompagnateur, dans des véhicules non conformes, etc… Pour éviter que les délais de présentation (et de représentation) ne deviennent interminables, les IPCSR n’auront d’autre choix que de baisser leur niveau d’exigence et donner le permis à des élèves mal formés et potentiellement dangereux.

Sans souhaiter de mal à personne, nous pourrions nous retrouver dans quelques mois dans un pays où les malades réserveront sur Doctolib et les futurs accidentés de la route réserveront leur place d’examen… sur Candilib. Triste époque.


Les organisations professionnelles reçues à Matignon le 14 février

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La semaine qui vient de s’écouler a été riche en événements. Dans le prolongement de la manifestation nationale de lundi et de la remise du rapport parlementaire par la députée du Gard Françoise Dumas le lendemain, les représentants des organisations professionnelles étaient reçues hier matin à Matignon, par Monsieur Antoine Saintoyant (Conseiller économie, finances, industrie auprès du Premier Ministre).

Cette réunion a été l’occasion pour les représentant des organisations professionnelles de réaffirmer plusieurs points.

1) L’opposition à l’ubérisation, qui met en danger de nombreux établissements et qui est synonyme de précarité pour toute une profession, ainsi que du modèle de société ultra-libéral et déshumanisé qu’elle sous-tend.

2) La nécessité de faire respecter les décisions de justice et de la législation avec (1) la fermeture du « Permis Libre », en application de la décision du Tribunal administratif de Lyon du 20 novembre 2018, et (2) la mise en place de contrôles effectifs contre le travail au noir et en dehors du cadre des établissements d’enseignement de la conduite (moniteurs exerçant sur Le Bon Coin).

3) L’existence de solutions concrètes pour faire baisser le coût de la formation au permis de conduire avec (1) la baisse de la TVA à 5,5% pour rendre le permis de conduire plus abordable, (2) l’affectation des recettes issues des radars au budget de formation des Français, ou encore des dispositifs permettant d’accroître la lisibilité des aides dans lesquels les auto-écoles joueraient un rôle de guichet unique.

4) La « dangerosité » de certaines mesures proposées dans le rapport Dumas et la nécessité de les abandonner, en particulier (1) l’inscription de la portée nationale de l’agrément dans le code de la route et (2) la possibilité pour les élèves de pouvoir décider seuls de leur inscription à l’examen pratique.

Le communiqué publié par le CNPA à l’issue de la réunion précise que « cette réunion marque le début de la concertation que lancera le Gouvernement dès la semaine prochaine, et jusqu’à la fin du mois de mars, pour débattre avec les professionnels de l’éducation routière de la réforme du permis de conduire. Les modalités de la réforme du permis de conduire seront annoncées à la suite de cette concertation, au plus tard au début du mois d’avril » (à la fin du Grand Débat national). Ces réformes seront prises par décret et ne feront pas l’objet de vote par le Parlement.

Les organisations professionnelles s’impliqueront dans cette concertation, menée par le Délégué interministériel à la Sécurité routière, Emmanuel Barbe, sous l’égide de Matignon et des ministères parties prenantes à cette réforme, et « veilleront à ce que les mesures qui seront actées à l’issue de ce processus soient favorables tant au pouvoir d’achat qu’à la qualité de l’éducation routière ». Elles souhaitent également que cette concertation mette en exergue l’importance des contrôles effectués au niveau départemental, et de faire respecter la réglementation.

Voir la vidéo publiée par l’UNIC à l’issue de la réunion à Matignon.

Rapport Dumas: les 23 propositions

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Ce mardi 12 février, la députée du Gard Françoise DUMAS remettait au Premier ministre son rapport sur le permis de conduire, intitulé « Vers un permis de conduire plus accessible et une éducation routière renforcée ». Dans ce rapport, la députée LREM formule 23 propositions destinées à favoriser l’accessibilité du permis de conduire, tant en termes de prix que de délai, et assurer un haut niveau de qualité pour l’éducation routière. Nous reproduisons ces propositions ici.

Proposition n° 1 : supprimer l’obligation, pour obtenir un premier permis de conduire avant 21 ans, de détenir une attestation de sécurité routière (ASR) pour les jeunes déscolarisés ou non scolarisés en France, pendant la période d’enseignement secondaire, afin de ne pas créer une contrainte supplémentaire pour l’accès au permis de conduire.

Proposition n° 2 : enrichir le contenu pédagogique de l’ASSR 2 et mettre en place un accompagnement des apprentissages des règles de circulation, en sécurité, sur l’espace public. Expertiser l’inscription de l’ASSR2 au programme de la classe de 4ème afin de garantir que tous les jeunes de 14 ans aient bénéficié de cet enseignement

Proposition n° 3 : renforcer le continuum éducatif tout au long de la scolarité en développant les contenus, en ouvrant la formation des élèves aux professionnels de la conduite et en tenant compte des nouvelles mobilités pour permettre aux élèves d’avoir une connaissance approfondie du code des mobilités.

Proposition n° 4 : favoriser les expérimentations pour adapter les messages de prévention aux territoires, notamment dans les DROM-COM.

Proposition n° 5 : prévoir un temps collectif d’échange pour l’apprentissage du code de la route et donner la possibilité à tous les jeunes de présenter l’épreuve théorique générale lors de la phase obligatoire du service national universel.

Proposition n° 6 : donner la possibilité à tous les jeunes accomplissant le service national universel volontaire de longue durée, la réserve nationale et le service civique de passer l’épreuve pratique du permis de conduire, pendant cette période, à titre gratuit.

Proposition n° 7 : revoir l’épreuve théorique générale et y introduire des épreuves concernant le code de la route, notamment la maîtrise de la signalisation en utilisant les outils d’analyse de données et les retours des plateformes internet. Clarifier et simplifier les questions afin de favoriser l’accessibilité de cet examen.

Proposition n° 8 : développer un vivier d’accompagnateurs pour encadrer les conduites accompagnées et supervisées afin que chaque candidat puisse bénéficier de ces dispositifs.

Proposition n° 9 : expertiser l’abaissement à 17 ans de la limite d’âge pour la délivrance d’un permis B, valable uniquement sur le territoire national. Cette faculté serait ouverte aux élèves en conduite accompagnée qui ont satisfait les obligations minimales (3 000 kilomètres, rendez–vous pédagogiques) et réussi l’épreuve pratique du permis de conduire. À 18 ans, le jeune disposerait d’un permis de conduire de droit commun.

Proposition n° 10 : L’article R. 213-1 du code de la route prévoit que : « Les agréments visés à l’article L. 213-1 sont délivrés pour une durée de cinq ans par le préfet du lieu d’implantation de l’établissement ». La mission propose de le compléter par les mots « Cet agrément a une portée nationale ».

Proposition n° 11 : compléter le livret d’apprentissage par la précision de l’identité du moniteur et le numéro de son autorisation d’exercer ou de l’accompagnateur bénévole et de son numéro de permis de conduire et rendre la présentation de ce livret obligatoire lors de l’épreuve pratique.

Proposition n° 12 : examiner une baisse de la taxe sur la valeur ajoutée pour les prestations relatives au permis de conduire dès lors que la directive en projet proposée par la Commission européenne sera adoptée.

Proposition n° 13 : définir et diffuser un contrat type (proposé par la DGCCRF) afin de garantir au candidat la transparence dans son parcours d’apprentissage de la conduite.

Proposition n° 14 : mettre en place (Délégation à la sécurité routière – DSR) un portail internet national permettant : d’accéder à l’inscription gratuite auprès de l’agence nationale des titres sécurisés (ANTS) à l’examen théorique général et à l’épreuve 2 pratique ; d’identifier les acteurs qui proposent un accompagnement personnalisé et notamment le vivier d’accompagnateurs bénévoles pour chaque territoire en coordination avec les Régions ; de connaitre le niveau de prestations offertes par chaque école de conduite, par exemple la durée précise d’un cours de conduite ; de publier les taux de réussite médians aux épreuves pratiques par école de conduite (assorti, si l’école le souhaite, d’un tableau présentant les taux de réussite en fonction d’un nombre d’heure de pratique, par profil type) ; d’accéder à l’information sur les modalités d’accompagnement financier.

Proposition n° 15 : parallèlement à la mise en place du label, il conviendra d’organiser une concertation de l’ensemble des acteurs du secteur, sous l’égide d’une personnalité qualifiée, pour définir la liste des prestations réalisées par les écoles de conduite qui seront portées à la connaissance du public sur le portail internet (proposition n° 14) notamment sur toutes les dimensions qualitatives et pédagogiques des prestations. Cette liste de critères remplacera le label actuel. Les conditions pour bénéficier des aides publiques ne seront pas liées au respect de tous les critères de cette liste. Cette dernière devra être mise en place dans un délai de six (6) mois à compter de la remise de ce rapport. Les contrats de labellisation déjà conclus ne seront pas remis en question.

Proposition n° 16 : étendre le dispositif de suramortissement voté en première lecture du Projet de Loi de Finances 2019 par l’Assemblée nationale au simulateur de conduite.

Proposition n° 17: promouvoir des modalités innovantes d’apprentissage de la conduite comme le recours à des simulateurs pour appréhender les manœuvres et les « mises en situation » au regard de certaines situations d’urgence (freinage d’urgence, conduite de nuit, sous la pluie / ou la neige) et augmenter le nombre d’heures d’apprentissage sur simulateur à dix heures ; promouvoir le permis de conduire sur les véhicules à boîte automatique et réduire à trois (3) mois le délai permettant sa transformation en permis « classique ».

Proposition n° 18 : développer un portail internet qui permette au candidat d’accéder facilement aux aides au financement du permis de conduire. Présenter ce portail lors des journées du service national universel. Expertiser la mise en place d’un guichet numérique, décliné au niveau régional, afin d’orienter et d’accompagner les demandeurs d’un financement du permis de conduire. Ce dispositif national serait piloté par les régions, au plus près des territoires.

Proposition n° 19 : désintermédier l’attribution des places de l’examen pratique en mettant en place un calendrier en ligne pour l’intégralité du territoire national, à l’instar de l’expérimentation en cours pour les candidats libres.

Proposition n° 20 : afin d’éviter que les candidats ne se présentent plusieurs fois et dans des délais très courts : facturer la seconde inscription à l’examen pratique et limiter le passage à une fois tous les quinze jours.

Proposition n° 21 : garantir l’homologation du véhicule à double commande présenté à l’examen pour permettre à tous les candidats d’être traités de la même façon. Si l’école de conduite dispose d’un véhicule disponible le jour de l’examen, elle pourrait d’ailleurs accompagner le candidat comme dans le système actuel.

Proposition n° 22 : faire évaluer par le ministère de l’Intérieur les mesures complémentaires de recrutement d’inspecteurs du permis (détachement de militaires ou policiers ; réduction de la durée de formation de certains inspecteurs ; organisation de concours d’inspecteurs locaux –Ile de France par exemple).

Proposition n° 23 : étendre l’expérimentation du Groupe La Poste à d’autres entreprises assurant des missions de service public.


Moniteurs d’auto-écoles en ligne : la précarité comme seul horizon

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Depuis le début de l’année, Ornikar et En Voiture Simone passent à la vitesse supérieure dans leur communication à destination des élèves… et, plus récemment, à destination des enseignants de la conduite. Face à l’afflux d’élèves attirés par les tarifs low cost avancés comme seul argument commercial, ces entreprises se doivent impérativement de trouver des enseignants en nombre, sous peine de créer de nombreux élèves mécontents (faute de place sur les plannings).

Aussi, ces deux entreprises ont mis en place des opérations de communication dans lesquelles elles vantent l’attractivité des partenariats qu’elles proposent aux professionnels. Par le biais de ces opérations, les auto-écoles en ligne visent à attirer certains enseignants, en leur faisant croire qu’ils bénéficieraient d’un salaire supérieur à celui que peuvent leur offrir les auto-écoles de proximité. Décryptage.

Vidéo postée sur le compte Facebook Ornikar Pro

Des calculs biaisés

Les salaires promis par Ornikar sont à la fois irréalistes et trompeurs. Ces calculs sont irréalistes car ils ne prennent pas en compte (ou minorent) certains éléments de charges. Ils partent du postulat que l’enseignant ne prend pas de congés, qu’il n’est jamais malade ou retenu par des obligations familiales.

Capture d’écran du site internet d’Ornikar

Ils ne prennent pas en compte les aléas inhérents à l’activité d’enseignant de la conduite, tels que les accidents et les pannes, qui impliquent une immobilisation du véhicule. Ils ne prennent pas en compte les aléas climatiques (le verglas notamment) qui rendent nécessaire l’annulation des leçons. Certains frais (parfois importants) liés à la restitution du véhicule ne sont pas pris en compte.

Ils impliquent un planning rempli à 100%, tous les jours de l’année. Aucune auto-école en France ne peut se vanter de ce taux de remplissage. Ils impliquent également une amplitude horaire très importante, au détriment de la vie personnelle de l’enseignant. Un salarié a un emploi du temps fixe et défini à l’avance, deux jours de repos consécutifs par semaine, les leçons décommandées sont rémunérées… Un enseignant auto-entrepreneur doit être disponible du lundi matin au samedi soir pour effectuer le même volume de leçons.

Ces chiffres ne prennent pas en compte le temps passé pour l’accompagnement des élèves à l’examen pratique, souvent supérieur à une heure en région parisienne (les convocations des candidats libres n’étant pas regroupées comme c’est le cas pour les auto-écoles traditionnelles).

Enfin ces chiffres sont trompeurs car le salaire mis en avant tient compte de l’ACCRE (Aide à la création ou à la reprise d’entreprise). Cette aide – qui consiste en exonération ou réduction de cotisations sociales – est passagère et dégressive (3 ans maximum). Par ailleurs, les exonérations disparaissent dès lors que les revenus dépassent 40 524 € (soit 135 heures par mois, à 25€/heure).

Ornikar est tellement conscient que les chiffres présentés ne correspondent pas à la réalité que l’entreprise s’est sentie obligée de préciser sur son site :
« Ce prévisionnel est non-contractuel, il est destiné à vous aider à comprendre votre activité et votre rémunération en tant qu’enseignant indépendant auto-entrepreneur. Il présente l’activité avec et sans l’ACCRE. »

Un salaire moins attractif qu’il n’y paraît

Afin de déterminer si les salaires vantés par les auto-écoles en ligne étaient à ce point attractifs, nous avons établi un tableau comparatif, en calculant le salaire d’un enseignant disposant du TP ECSR selon qu’il soit salarié au salaire minimum, salarié au salaire moyen ou auto-entrepreneur pour le compte d’une plateforme.

Il ressort de cette comparaison que si l’on retire les exonérations de charges temporaires et que l’on prend en compte les charges réelles, le salaire d’un enseignant auto-entrepreneur est inférieur au salaire moyen d’un enseignant salarié. Si l’on prend en compte les aléas décrits précédemment, le salaire d’un enseignant d’Ornikar ou d’En Voiture Simone tendra, à terme, vers le salaire minimum d’un salarié.

En 2015 déjà, la Tribune des auto-écoles avait réalisé des calculs dont le résultat est relativement proche.

Aux considérations purement financières s’ajoutent le fait que l’enseignant auto-entrepreneur bénéficie de protections bien moins importantes et qu’ils sont soumis à des formalités qui devront être effectuées sur leur temps libre. Enfin, il est nécessaire de prendre en compte que le régime de retraite des auto-entrepreneurs est moins favorable que celui des salariés et que ceux-ci ont plus de difficultés à contracter des prêts (immobiliers notamment) auprès des banques.

Moniteur Ornikar = futur smicard?

Autre phénomène à souligner : plus le nombre d’enseignants sera important sur ces plateformes, plus le risque que les salaires baissent est important. En effet, si les disponibilités des enseignants travaillant sur ces plateformes venaient à excéder la demande en leçons de conduite, alors la tentation serait forte pour les plateformes de faire jouer la concurrence entre auto-entrepreneurs (et de tirer les rémunérations vers le bas). Des phénomènes similaires ont été constatés sur les plateformes de réservation de VTC, ainsi que sur celles de livraison de repas. Ce phénomène a été documenté dans de nombreux articles (ici, ici ou encore ici), mais surtout dans le rapport remis par Jacques Rapoport en 2017 (voir plus bas).

Les belles promesses d’aujourd’hui pourraient se transformer demain en désillusions et en précarité…


Entretien avec François Lopez

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François Lopez, gérant de l’auto-école Le Local à Nice, a porté plainte en fin d’année contre Ornikar, ainsi que plusieurs moniteurs indépendants. Nous sommes allés à sa rencontre cette semaine.

Bonjour Monsieur Lopez. Vous avez porté plainte contre la start-up Ornikar ainsi que contre plusieurs moniteurs indépendants exerçant à Nice, pouvez-vous nous en dire plus ?

Mon auto-école s’est portée partie civile dans une procédure pénale déposée le 21 décembre 2018 au commissariat de l’Arianne, à Nice. L’objet de ma plainte contre la société Marianne Formation (Ndlr: nom de la structure juridique d’Ornikar) et deux moniteurs indépendants est: (1) publicité, par personne morale, tendant à favoriser volontairement le travail dissimulé, et (2) exécution d’un travail dissimulé par personne morale

Pourquoi cette plainte?

Nous les auto-écoles traditionnelles, de proximité, nous subissons en permanence des attaques de toute part… Cette start-up investit énormément d’argent dans de la publicité, vous avez sans doute entendu leur slogan «10 fois moins chers qu’en auto-école ».

Ce qui me révulse c’est qu’ils mettent dans la tête des jeunes l’idée, déjà latente (et largement relayée dans tous les médias), que nous sommes des escrocs… à coup de milliers d’euros de pubs télé, Snapchat, Facebook…

Ils vendent un accès 40 séries pour 29,90€ dans mon auto-école l’accès code en ligne c’est 151 séries pour 25€ donc ils comparent deux formules non comparables… ils n’ont aucun échange humain.

Vous dites avoir porté plainte contre Ornikar et contre leurs moniteurs indépendants… pourriez-vous nous expliquer les raisons de votre mécontentement ?

Mon mécontentement vient du fait que cette auto-école en ligne se développe au mépris des lois. Je m’explique :

En discutant avec mon avocat de la situation dans laquelle nous petite auto-école nous trouvons, il m’explique qu’ils sont eux même dans la même situation d’uberisation à outrance et me donne une définition pragmatique de l’uberisation. D’après mon avocat, il y a trois phases :

  • Phase 1 : une start-up se positionne sur un marché existant ;
  • Phase 2 : elle décrédibilise les acteurs existants (le code pour seulement 29,90€, « dix fois moins chers qu’en auto-école »), paye correctement ses indépendants et s’aligne sur le prix le plus bas du marché, c’est dans la phase 2 que la start-up cumule des pertes ;
  • Phase 3 : elle a l’obligation de baisser ses tarifs à la vente et par la même occasion baisse les tarifs des indépendants à qui elle fournit du travail pour pouvoir survivre face à une concurrence féroce. Exemple le cofondateur d’Ornikar ouvrant une coopérative d’indépendants et demain concurrencera à coup sûr le modèle Ornikar.

Pour en revenir à l’objet de ma plainte, la mise en relation de moniteurs indépendants (payés pour ce service) et de candidats libres est illégal aujourd’hui…

Les textes qui encadrent l’apprentissage de la conduite sont là pour protéger l’élève / candidat. Si l’on se passe de cette protection comme le fait aujourd’hui Ornikar, c’est la porte ouverte a toutes les dérives.

Il doit y avoir cette relation protégeant l’élève.

Un enseignant supervisé par son employeur c’est indispensable

Le gérant, directeur pédagogique ce dernier pouvant lui-même être sanctionné car il détient un agrément de sa préfecture, cet agrément donne à l’auto-école des droits et des devoirs…

La société Ornikar outrepasse ce cadre protecteur.

Vous défendez donc le système actuel, l’auto-école à l’ancienne? Vous n’êtes pas sans ignorer les reproches qui lui sont fait?

Vous êtes un peu dur! Comme dans toute profession il y a des bons et des moi moins bons… mais pensez-vous que les gens de notre génération gardent un mauvais souvenir de leur auto-école ?

Aujourd’hui, les gens pensent que tout devrait être gratuit! Si l’on regarde combien coûte une voiture, l’assurance, le carburant, l’entretien, les réparations, la place de parking… les auto-écoles gagnent très peu d’argent.

Je pense qu’il faut regarder où cette politique du prix cassé nous conduit! La formation de nos gamins doit être uberisée ? Et leur sécurité sacrifiée?

Les objectifs en termes de diminution du nombre de morts sur nos routes on en fait quoi ? Combien coûte une vie humaine, 749€ ?

D’autres pays ont essayé ce système libéral et les chiffres de l’insécurité routière ont explosés… Ils sont revenus en arrière sur notre modèle actuel « d’auto-école à papa ».

Parmi les arguments avancés par le gouvernement pour réformer le secteur, on trouve l’harmonisation des législations au sein de l’Union européenne. Quel lien voyez-vous entre votre plainte et le projet Européen?

Je ne suis que le gérant d’une petite auto-école, comme il en existe plus de 10 000 en France. Mes collègues et moi, nous sommes des petits producteurs de richesses locales. Nous ne faisons pas de d’optimisation fiscale au Luxembourg.

J’ai 5 salariés plus moi-même. Nous faisons vivre le territoire sur lequel nous éduquons nos enfants pour qu’ils deviennent des adultes responsables.

Où voulez-vous en venir avec cette plainte?

Je ne fais pas de politique, en portant plainte à l’encontre d’une société hors-la-loi contre des acteurs échappant à tous les contrôles.

Je demande aux auto écoles de se regrouper autour d’un collectif car ma plainte prendra tout son sens une fois l’agrément national acté et nous demanderons des dommages et intérêts selon les barèmes en vigueur.

Ceux qui souhaitent soutenir notre initiative ont la possibilité de faire un don sur la cagnotte Leetchi créée à cet effet.

Je précise que nous ne sommes pas réfractaires aux évolutions mais nous restons vigilants quant aux intentions de cette classe politique ultralibérale.

Nous continuerons à protéger nos enfants.

Je dis non au rapport Dumas/Guerrini.

Merci.


Auto-écoles : place à l’unité et à la mobilisation!

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Depuis quelques jours, les grandes lignes du rapport de la mission parlementaire sur le permis de conduire sont connues. Comme beaucoup d’entre nous l’avaient pressenti, les « solutions » prônées pour renforcer la qualité des formations et garantir l’accessibilité du permis de conduire mettent un peu plus en péril la survie des auto-écoles de proximité, sans pour autant répondre aux objectifs affichés.

L’apprentissage du code à l’école et le passage de l’examen pendant le Service national universel (SNU), l’agrément national, l’inscription des candidats libres sur le site de la Sécurité routière… sont autant de mesures qui, si elles devaient être mises en place, précipiteront une grande partie des établissements vers la faillite.

Aussi, face à cette menace mortelle, l’heure n’est plus aux querelles de clochers entre les tenants de telle ou telle ligne, de tel ou tel syndicat. L’heure est à l’unité et au rassemblement de tous. Une manifestation est prévue le 11 février à Paris à l’appel des organisations professionnelles. Pour avoir une chance d’être entendus, il est primordial que cette manifestation rassemble le plus grand nombre d’entre nous.

Auto-écoles jaunes, vertes, violettes, bleu-blanc-rouge ou rouge et noires…

Tous à Paris le 11 février!

Auto-écoles de centre-ville, de banlieue, de campagne…

Tous à Paris le 11 février!

Auto-écoles traditionnelles, auto-écoles de proximité, auto-écoles « nouvelle génération »…

Tous à Paris le 11 février!

Auto-écoles syndiquées, non-syndiquées, indépendantes ou franchisées…

Tous à Paris le 11 février!

Mobilisons nos collègues, nos salariés, nos proches! Sur Printel, sur Facebook, sur les centres d’examen. Une seul mot d’ordre…

Tous à Paris le 11 février!

Le temps n’est plus à l’hésitation ou à se trouver des excuses. Oublions nos divisions passées et faisons front commun pour la défense de notre profession et, au delà, d’une certaine vision de notre société!

Le 11 février, manifestons tous ensemble pour demander au gouvernement :

  • de faire respecter la législation en interdisant le recours aux travailleurs indépendants pour l’enseignement de la conduite ;
  • de durcir les contrôles contre les loueurs de véhicules à doubles commandes proposant des prestations d’enseignement de la conduite (sans disposer d’agrément) ;
  • de réaffirmer la portée départementale de l’agrément et l’obligation de disposer d’un local ;
  • de renoncer à généraliser la présentation à l’examen pratique en candidat libre ;
  • et, enfin, de lutter contre tous ceux qui – aujourd’hui ou demain – seraient tentés de réduire la formation à la conduite à un simple service marchand, au détriment de la sécurité routière.

Pour défendre l’avenir des auto-écoles, tous à Paris le 11 février!


Décret n°2019-14 du 8 janvier 2019 relatif au cadre national des certifications professionnelles

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Veille juridique Auto-école

Décret n° 2019-14 du 8 janvier 2019 relatif au cadre national des certifications professionnelles


[Rétrospective] L’actualité du mois de novembre 📽️

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La fin d’année approche à grand pas et avec elle l’heure des bilans ! Sans attendre de passer en 2019, nous avons souhaité faire le point sur un mois de novembre particulièrement riche en annonces. Retour sur les événements .

9 novembre : M. Macron annonce sa volonté de faire « baisser drastiquement le prix du permis de conduire »

Alors qu’il entame une semaine d’itinérance mémorielle, dans le cadre du Centenaire de la Grande Guerre, le président Macron se trouve confronté à la contestation sociale incarnée du mouvement des « Gilets jaunes ». Afin de tenter de désamorcer la grogne, et donner l’impression d’un gouvernement qui agit, il annonce des mesures pour baisser « drastiquement » le prix du permis de conduire : faire passer le code à l’école (ou pendant le service civique).

Ces déclarations provoquent la stupeur et l’incrédulité au sein des écoles de conduite. Depuis lors nombreux sont les professionnels à avoir constaté une baisse « drastique » des inscriptions, mettant en péril la santé financière – déjà fragile – des écoles de conduite.

Notre analyse : Prix du permis de conduire, pourquoi Monsieur Macron se trompe de combat ?

14 novembre : Les chiffres fous d’Ornikar. « 20% du marché », vraiment ?

Porté par les déclarations présidentielles, Ornikar, par l’intermédiaire de son dirigeant, Benjamin Gaignault, entame une opération de communication dans les médias, avec une série d’articles et un communiqué de presse publié sur le site de la Fédération des Enseignants des Auto-écoles d’Avenir, syndicat qui regroupe également En Voiture Simone et Le Permis Libre.

Le 14 novembre, Monsieur Gaignault est reçu dans l’émission « Good Morning Business » présentée par Stéphane Soumier. Pendant un peu plus de 5 minutes d’« interview » (nous préférons mettre des guillemets, tant il s’agissait davantage d’un publi-reportage que d’un entretien journalistique), une série de chiffres plus ou moins fantaisistes sont énumérés :

  • Ornikar a « divisé par 2 le coût du permis de conduire » :  FAUX , les députés Guérini et Dumas ont donné les chiffres moyens de 1 844 euros dans une auto-école classique, 1 581 euros dans une auto-école en ligne (soit un prix 14% moins cher).
  • 200 000 nouveaux élèves / 20% du marché :  FAUX . Ornikar semble confondre le fait d’acheter des accès pour réviser son code de la route et le fait de faire une formation complète. Par ailleurs, Ornikar semble confondre ses objectifs 2019 avec les chiffres effectivement réalisés en 2018 ;
  • 500 enseignants partenaires en 2018 / 1500 prévus en 2019 :  INVÉRIFIABLE . Une chose est sure, 500 enseignants ne peuvent pas former 200 000 élèves… un simple calcul suffit à le vérifier.
  • 500 000 heures de conduite dispensées en 2018 :  INVÉRIFIABLE  et surtout incohérent avec les nombres d’élèves précédemment cités !
  • Société rentable :  INVÉRIFIABLE .
  • Un meilleur taux de réussite que les auto-écoles:  FAUX , les taux de réussite des élèves présentés en candidat libres (ce qui est le cas des élèves Ornikar) est 15 points inférieur à la moyenne.

Notre analyse : Depuis longtemps déjà Ornikar gonfle ses chiffres

20 novembre : Le Permis Libre condamné à 1 mois et demi de fermeture administrative, les indépendants requalifiés en salariés

Mi-avril, l’ancien préfet du Rhône, Stéphane Bouillon, avait ordonné la fermeture administrative de l’auto-école Le Permis Libre pour trois mois. Cette fermeture avait été suspendue en référé au motif qu’elle mettait en danger la survie de la start-up lyonnaise. Le 20 novembre, le tribunal administratif de Lyon a annulé partiellement cette fermeture (ramenée tout de même à un mois et demi), mais estime que l’activité des moniteurs « en faisaient des salariés de l’entreprise et non des auto-entrepreneurs ».

Selon le tribunal « les conditions d’exercice de leur activité par ces moniteurs d’auto-école dans le cadre de la plateforme numérique « Le permis libre » en faisaient des salariés de l’entreprise et non des auto-entrepreneurs. En effet les modalités de tarification et de facturation sont décidées unilatéralement par la société R&L et celle-ci dispose d’outils de contrôle et de surveillance des moniteurs, peut leur donner des directives et prononcer des sanctions. Il existe ainsi un lien de subordination juridique permanente durant l’exécution de ce travail entre ces moniteurs d’auto‑école et la société R&L, exploitante de la plateforme, traduisant en l’espèce une relation de salariat. »

Cette décision de justice constitue une première victoire contre le modèle défendu par certaines plateformes (Ornikar et En Voiture Simone pour ne pas les nommer). Le lien de subordination et la possible requalification des auto-entrepreneurs en salariés viendraient remettre en question l’existence même de ces modèles low cost.

28 novembre : La réunion entre organisations patronales et le gouvernement reportée

Face au mécontentement, l’Elysée accepte de recevoir les représentants des deux principales organisations patronales, réunis en intersyndicale, le CNPA et l’UNIDEC. Cette réunion est annulée à la dernière minute et reportée au lundi 3 décembre.

Les principales annonces à la sortie de l’Élysée.


[Opinion] Prix du permis de conduire, pourquoi Monsieur Macron se trompe de combat ?

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Lors de sa visite dans un centre social à Lens, le 9 novembre 2018, le président Macron annonce sa volonté de mettre en place des mesures pour diminuer « drastiquement le prix du permis de conduire ». Si ses intentions sont louables (redonner du pouvoir d’achat et aider les jeunes à s’insérer dans la vie professionnelle), le Président se trompe de combat ! Le permis de conduire représente certes un coût non négligeable mais il est à relativiser et à mettre en perspective avec d’autres coûts tout aussi indispensables.

Le coût des études supérieures

Une fois leur bac obtenu, les jeunes ont certes besoin d’un véhicule pour s’insérer dans le monde professionnel, mais ils ont avant tout besoin de suivre des études supérieures. Il est pertinent de comparer, dans la mesure où les études supérieures (comme le permis de conduire, en théorie) ne se passent qu’une fois au cours de la vie.

Selon une enquête sur le sujet par l’institut CSA Research au printemps 2018, le budget global consacré par les familles françaises aux études supérieures est de 7 118 euros en moyenne par an et par enfant. Un montant qui inclut toutes les dépenses, directes et connexes (frais de scolarité, de logement, d’alimentation, de transport, etc.). Sans surprise, le choix de filières sélectives, comme les écoles de commerce (10 735 euros) et d’ingénieurs (9 733 euros), coûte nettement plus cher que celui de cycles courts et professionnalisant, comme le BTS (6 870 euros) ou de l’université (6 473 euros).

Selon que l’élève suive une formation courte de type licence (3 ans) ou une formation plus longue (un master, en 5 ans), le coût des études est donc compris entre 20 000 et 36 000€. Le coût des études supérieures est donc entre 11 et 20 fois le prix d’une formation au permis de conduire.

Le coût d’une voiture

Passer le permis à moindre coût, c’est bien, mais quel est l’intérêt si l’on n’a pas les moyens ensuite de posséder et entretenir un véhicule par la suite?

Si aujourd’hui, le prix d’un véhicule neuf se situe en moyenne autour de 25 000€ (soit exactement l’équivalent d’une année de salaire moyen), le budget consacré par les ménages à l’automobile s’élève lui à 12% de leurs revenus. Une étude de 2015 estimait à 5 800€ le coût annuel (carburant, entretien, réparation et assurance) d’une Clio essence, modèle le plus vendu en France.

Au cours de sa vie de conducteur (estimée à 60 ans), un automobiliste dépensera ainsi quelques 350 000€ pour son véhicule. Le coût du permis représente donc 0,5% des dépenses liées à l’automobile au cours d’une vie.

Le coût du permis… mensualisé

Pour bien se rendre compte du coût du permis de conduire, un autre calcul pourrait consister à ramener son coût par mois. Aujourd’hui, de nombreux services sont mensualisés (la téléphonie, les frais bancaires, etc.). Si l’on divise le coût moyen de la formation (1 840€) par sa durée d’utilisation (60 ans, soit 720 mensualités), obtenir son permis de conduire revient à… 2€50 par mois.

Les exemples pourraient être multipliés à l’infini ! Ce n’est pas notre objectif. Il s’agit uniquement de souligner que la formation au permis de conduire reste relativement peu chère comparée à d’autres dépenses tout aussi nécessaires. Vouloir raboter le coût de cette formation, le plus souvent au détriment de la qualité est donc bien dérisoire.

Un élève moins bien formé sera plus dangereux sur la route, pour lui-même et pour les autres. Ainsi, le coût pour la société risque, au final de s’en trouver majoré.

Quelles solutions?

Pour faire baisser le prix de la formation au permis de conduire, des solutions existent :

  • Exonérer les établissements d’enseignement de la conduite du paiement de la TVA (comme c’est le cas pour les établissements d’enseignement supérieur) ;
  • Réduire ou exonérer les établissements d’enseignement de la conduite des cotisations sociales grâce à un dispositif semblable au CICE (qui prendra fin en janvier 2019) ;
  • Mobiliser des nouveaux dispositifs de financement. Par exemple, permettre aux parents de faire bénéficier à leurs enfants des heures de formations accumulées sur leurs comptes CPF (cette idée est notamment défendue par Hicham Amri, l’un des cofondateurs du réseau Point Conduite).

[Analyse] Depuis longtemps déjà Ornikar gonfle ses chiffres

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Le 14 novembre, Monsieur Gaignault est reçu dans l’émission « Good Morning Business » présentée par Stéphane Soumier. Pendant un peu plus de 5 minutes d’« interview », une série de chiffres plus ou moins fantaisistes sont énumérés. Parmi ces chiffres, un a retenu notre attention : 200 000 élèves inscrits, qui représenteraient « 20% du marché ».

Nous avions déjà parlé des taux de réussite affichés par la start-up nantaise au code de la route et à la conduite. Penchons-nous à présent sur l’évolution du nombre de candidats revendiqués par Ornikar depuis sa création.

La start-up ne commence à communiquer autour de son nombre d’élèves inscrits qu’à partir du moment où elle obtient un agrément début 2016. Le 21 janvier 2016, Ornikar affichait déjà 8187 inscrits, près de trois ans plus tard, ce nombre est passé à 522 144.

Ces chiffres sont-ils crédibles? À quoi correspondent-ils? Tentons d’y voir un peu plus clair.

500 000 élèves en 3 ans?

Selon le compteur présent sur son site, Ornikar aurait inscrit plus de 500 000 élèves depuis 2016.

Capture d’écran du site Ornikar.com

Ces chiffres sont cependant à prendre avec beaucoup de recul. Il s’agit en effet de chiffres déclarés (et non audités). Ces chiffres sont des éléments de communication invérifiables. Par ailleurs, Ornikar joue sur les mots « élèves », « inscrits », « utilisateurs » ont tour à tour été employés. Le plus probable est que ces chiffres représentent le nombre de comptes utilisateurs créés sur la plateforme.

Posséder un compte utilisateur (gratuit) ne signifie par forcément être client ou élève. De la même façon, acheter un accès au code de la route à 29€90 ne suffit pas à dire que l’élève a fait sa formation chez Ornikar.

Un début d’essoufflement?

Autre indication intéressante, si l’on regarde l’évolution du taux de croissance du nombre d’utilisateurs, on constate que celui-ci est en forte baisse depuis la fin de l’été.

Plusieurs explications possibles :

  • Ornikar connaît un début d’essoufflement, le bouche-à-oreille fait son effet ;
  • Ornikar découvre le principe de la saisonnalité avec une hausse des inscriptions avant l’été et à la rentrée, puis une baisse à l’automne ;
  • dernière hypothèse, les chiffres ont été un peu trop « gonflés » par le passé et cela commençait à se voir.

Des tarifs moins attractifs 

Jusqu’à présent, Ornikar communiquait sur des tarifs « 10 fois moins chers » pour la code de la route et « 2 fois moins chers » pour la conduite. La mise à jour récente (courant novembre du site internet, a été l’occasion de revoir ces affirmations à la baisse. La partie pratique est désormais présentée comme étant « 35% moins chère » qu’en auto-école traditionnelle. Cette affirmation se base sur une étude vieille de plus de 2 ans et est encore éloignée des chiffres officiels qui parlent d’un écart de 15%.

Que retenir de tout ça? Les chiffres présentés par Ornikar sont dé-corrélés de la réalité. Ils sont utilisés par la start-up pour communiquer et pour paraître plus importante qu’elle n’est réellement. Les exemples dans l’histoire ont montré qu’il était compliqué de se défaire de telles exagérations et que toute bulle finit par éclater…