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Ornikar, nouvelle start-up d’État?

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Mise à jour du 22 juillet 2019, à 15h. Certaines informations contenues dans cet article se sont révélées fausses. Pour connaître les derniers éléments en notre possession, vous pouvez consulter l’article Ornikar et les millions manquants.

La plateforme de mise en relation entre élèves et moniteurs indépendants a annoncé vendredi dernier une troisième levée de fonds de 35 millions d’euros, réalisée auprès d’Idinvest Partners, de Brighteye Ventures et de Bpifrance, et a précisé ses ambitions pour les années à venir. Ce financement, par de l’argent public, pose un certain nombre de questions.

Bpifrance, actionnaire de référence

La prise de participation réalisée par la banque publique d’investissement (détenue à 50% par l’État français et à 50% par la Caisse des Dépôts et consignations) s’est par l’intermédiaire de son fond Large Venture.

Si les trois fonds d’investissement ont contribué à la même hauteur lors de cette Serie-B (nom donné au troisième tour de financement des start-up, après l’amorçage et la Serie-A, NDLR), ce sont donc entre 10 et 15 millions d’euros d’argent public qui ont été investis par Bpifrance dans Ornikar.

Sur son site internet, Bpifrance décrit les objectifs de ce fonds :

Capture d’écran du site de Bpifrance

Cet investissement pose de nombreuses questions. Les services de l’État qui, jusqu’alors, promettaient de s’en tenir à une stricte neutralité et se défendaient de favoriser le modèle des auto-écoles en ligne (au détriment des auto-écoles de proximité), pourront-il garder cette posture plus longtemps? Alors même que des représentants de Bpifrance siégeront aux organes de direction d’Ornikar.

La décision des juges, appelés à statuer sur la portée départementale ou nationale de l’agrément, ne risque-t-elle pas d’être influencée?

Les préfets, représentants de l’État en région, ne risque-t-il pas d’hésiter à ordonner des contrôles (pouvant potentiellement déboucher sur des sanctions) dès lors que l’État possède un intérêt financier dans Ornikar?

Une levée de fonds d’un tel montant ne s’improvise pas. Elle nécessite plusieurs mois de travail. Aussi, l’investissement de Bpifrance donne à réfléchir et éclaire d’un jour nouveau l’actualité de ces derniers mois. Le rapport Dumas, tout d’abord, dont certaines mesures sont particulièrement favorables aux auto-écoles en ligne (nous vous en parlions dans cet article). La mise en place de Candilib ensuite qui vise, comme son nom l’indique, à généraliser le faux candidat « libre ». Si Ornikar n’est pas derrière la mise en place de la plateforme Candilib à proprement parlé, ses équipes techniques ont été discrètement consultées au cours de réunions de travail au Ministère de l’Intérieur.

Une entreprise désormais rentable

Cette levée de fonds est l’occasion pour Ornikar de faire passer plusieurs messages forts :

  1. l’entreprise aurait été rentable en 2018. C’est possible mais invérifiable à l’heure qu’il est étant donné que l’entreprise n’a pas publié ses comptes 2018 (son exercice fiscal se termine au 31 mars) ;
  2. cette levée de fonds va servir à l’entreprise à proposer de nouveaux produits à ses élèves à l’issue de leur formation (assurance automobile et ventes / location de véhicules). Elle utilisera pour cela les données collectées sur ses élèves tout au long de leur formation ;
  3. Ornikar compte utiliser ces fonds pour se lancer dans de nouveaux pays, en Allemagne et en Espagne notamment où l’entreprise est présente (sous le nom d’Odokar et d’Obikar) mais où son activité semble très réduite. L’entreprise ne possédant pas, dans ces pays, des puissants soutiens politiques qu’elle a en France.

La vidéo complète de l’interview de Benjamin Gaignault :

Des chiffres qui posent toujours question

Ornikar a un problème avec les chiffres, cela fait un moment que nous le disons! Taux de réussite, tarifs, nombre d’inscrits… la start-up communique des chiffres complètement décorrélés de la réalité.

Le plus étonnant dans tout ça est que les médias grand public semblent reprendre les communiqués de presse, tels quels, sans jamais s’interroger sur la véracité des chiffres avancés. Ainsi, Challenges écrit dans son article qu’« en 2019, [l’entreprise] a raflé plus d’un tiers du marché de l’apprentissage de la conduite. Elle prévoit d’accueillir 350.000 jeunes conducteurs – contre 200.000 en 2018 – sur un marché total d’un million de candidats au permis ». La Tribune indique, elle, « plus de 1,5 million de personnes, surtout des jeunes de moins de 25 ans, se sont présentés à l’examen de passage du permis de conduire en 2018 en France. Parmi eux, 350.000 avaient pris des cours via la plateforme Ornikar ».

Ces chiffres mélangent utilisateurs et clients. Ils assimilent l’achat d’un code en ligne à une formation complète (code et conduite). Si Ornikar formait vraiment un conducteur sur trois en France, alors son chiffre d’affaires serait compris entre 350 et 400 millions d’euros… et non pas 10-20 millions comme annoncé pour 2018, ou 35 millions comme prévu pour 2019.

Pour avoir des chiffres plus crédibles, il faut se tourner vers la presse spécialisée anglo-saxonne, notamment le site TechCrunch qui écrit : « Every month, 30,000 people sign up to Ornikar in France. The startup manages 70,000 hours of lessons per month on its marketplace. » (en français: Chaque mois, 30 000 personnes se créent un compte sur Ornikar en France. La start-up dispense 70 000 heures par mois sur sa plateforme).

Si 360 000 personnes se créent un compte sur Ornikar, cela ne veut pas dire que ces personnes sont toutes clientes. Et, parmi ceux qui le sont effectivement, une grande partie ne va pas au bout de sa formation sur la plateforme et finit par aller s’inscrire en auto-école.

Quant aux 70 000 leçons dispensées par mois, elles correspondent à 2 300 élèves par mois effectuant 30 heures de conduite, soit 28 000 candidats par an (2,5% du nombre de candidats)! Nous sommes encore bien loin des 350 000…! Le vrai problème d’Ornikar, c’est son incapacité à convaincre les élèves d’effectuer leur formation pratique sur la plateforme. Malgré les campagnes marketing intensives, ces derniers continuent à préférer l’apprentissage au sein des auto-écoles de proximité.

Que disent les chiffres?

Si les chiffres parus dans la presse sont exacts, cela signifie que :

  1. Ornikar ne parvient pas à remplir les plannings de ses enseignants, tout juste un gros mi-temps. 70 000 leçons dispensées par mois, pour 700 enseignants = 100 heures par enseignant / mois. Les promesses de salaires faites aux enseignants sont donc fausses (relire notre article Moniteur d’auto-école en ligne : la précarité comme seul horizon)
  2. Un panier moyen plutôt faible. Ornikar vise les 350 000 clients sur 2019 et, dans le même temps, un chiffre d’affaires de 35 millions d’euros. Cela représente un panier moyen de 100€ / élève et conforte l’hypothèse que seul un faible pourcentage d’élèves passent par Ornikar pour leur formation pratique.

Arrêté du 26 juin 2019 relatif à l’expérimentation d’une signalisation d’une zone à circulation restreinte dans certaines communes de la métropole du Grand Paris pour certaines catégories de véhicules

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Veille juridique Auto-école

Signalisation d’une zone à circulation restreinte sur certaines communes de la métropole du Grand Paris, dont l’accès est interdit à certaines heures aux véhicules les plus polluants. L’arrêté autorise l’expérimentation d’une signalisation de zone à circulation… Lire la suite


Décret n°2019-564 du 6 juin 2019 relatif à la qualité des actions de la formation professionnelle

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Veille juridique Auto-école

Détermination des critères du référentiel national sur la qualité des actions de formation professionnelle. Le texte détermine les critères du référentiel national sur la qualité des actions de formation professionnelle, sur la base duquel les organismes prestataires… Lire la suite


Note d’information du 29 mai 2019 relative à la modification de l’arrêté du 12 janvier 2012 fixant les conditions de reconnaissance et d’échange des permis de conduire délivrés par les États n’appartenant ni à l’Union européenne, ni à l’Espace économique européen

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Veille juridique Auto-école

L’arrêté du 9 avril 2019 modifie l’arrêté du 12 janvier 2012 fixant les conditions de reconnaissance et d’échange des permis de conduire délivrés par les États n’appartenant ni à l’Union européenne, ni à l’Espace économique européen, mettant fin à la dispense d’accord… Lire la suite


[Manifestation] Le 20 mai, les auto-écoles, taxis et ambulanciers disent non à l’ubérisation

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Lundi prochain, 20 mai, une manifestation nationale est organisée à Paris à l’appel de plusieurs collectifs et syndicats d’auto-écoles afin de réaffirmer le rejet de l’ubérisation et de la dé-réglementation, à une semaine du début de l’examen de la loi d’orientation des mobilités (LOM) par l’Assemblée nationale en deuxième lecture.

Après les mobilisations du 11 février et du 1er avril à Paris, celles du 4 mars à Lyon et à Nantes et de celle du 25 mars au Mans, les écoles de conduite descendent à nouveau dans la rue à Paris, mais également à Toulouse, Strasbourg, Dijon et Nevers. Elles seront accompagnées cette fois d’ambulanciers et de taxis, deux professions soumises aux mêmes menaces : l’ubérisation et la précarisation.

Cette manifestation interprofessionnelle est une première dans le secteur. Elle traduit un refus profond et généralisé de la concurrence déloyale des plateformes, de la fin du salariat et des principales mesures préconisées par le rapport Dumas (code au SNU, recours accru aux simulateurs, désintermédiation de la réservation de l’examen pratique, portée nationale de l’agrément…).

Ces mesures, pour certaines rejetées par le Sénat, ont été réintroduites en deuxième lecture par voie d’amendement (voir ici, ici ou encore ici).

Il est donc indispensable, lundi prochain d’être le plus nombreux possible à manifester à Paris contre ces mesures afin d’alerter les députés et, au-delà, l’opinion publique sur leurs conséquences, sur les écoles de conduite de proximité et sur la sécurité routière!

Tous à Paris, lundi 20 mai !

L’appel commun à la manifestation et les points de rassemblement


Arrêté du 2 mai 2019 relatif à la formation complémentaire prévue à l’article L. 223-1 du code de la route

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Veille juridique Auto-école

Mise en œuvre de la formation complémentaire prévue à l’article L. 223-1 du code de la route. La formation complémentaire prévue à l’article L. 223-1 du code de la route, destinée à renforcer les compétences acquises par les conducteurs, repose sur une démarche… Lire la suite


Arrêté du 2 mai 2019 modifiant l’arrêté du 26 février 2018 modifié portant création du label « qualité des formations au sein des écoles de conduite et reconnaissance des équivalences à ce label »

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Veille juridique Auto-école

Modification des annexes de l’arrêté du 26 février 2018 portant création du label « qualité des formations au sein des écoles de conduite et reconnaissance des équivalences à ce label » L’arrêté du 26 février 2018 modifié portant création du label « qualité des formations au sein des écoles de conduite et reconnaissance des équivalences à ce label ». Lire la suite


Note d’information du 29 avril 2019 relative aux permis de conduire délivrés par le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

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Veille juridique Auto-école

L’arrêté du 3 avril 2019 prévoit le dispositif pour les titulaires de permis britanniques en résidence normale à la date de sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. La présente note sensibilise les préfectures, chargées de mettre à jour leur site internet. Deux… Lire la suite


Réunion à Matignon: vers une sortie de crise?

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Mardi se tenait à Matignon une réunion dite de « sortie de crise ». Une semaine après la manifestation nationale, les organisations professionnelles étaient reçues par les conseillers du Premier Ministre. Le Délégué interministériel à la sécurité routière, Emmanuel Barbe, était également présent. Les comptes rendus publiés par le CNPA et l’UNIDEC (d’une part) et par l’UNIC (d’autre part) offrent des points de vue diamétralement opposés. Verre à moitié plein ou verre à moitié vide?

La réunion du 9 avril s’inscrit dans le prolongement de celle qui avait eue lieu le lundi 1er avril, à l’issue de la manifestation nationale des écoles de conduite. Cette première réunion avait été l’occasion de remettre au gouvernement un ensemble de propositions rédigées par les OP et les collectifs.

Au cours de cette deuxième réunion, les organisations professionnelles ont insisté sur « l’absolue nécessité d’une équité fiscale, sociale et réglementaire, pour l’ensemble des acteurs » et exigé « que l’ensemble des acteurs aient les mêmes règles du jeu ». Ces demandes légitimes ont, semble-t-il, été entendues.

Différents sujets ont été abordés et des précisions ont été faites sur les pistes de réformes privilégiées à l’heure actuelle:

  • Le statut de candidat libre. Le gouvernement semble avoir pris conscience que le statut de candidat libre a été dévoyé par les auto-écoles en ligne. Seuls les élèves se formant à la conduite en dehors du cadre de l’auto-école (apprentissage à titre non onéreux, cf. Arrêté du 16 juillet 2013 et note de la responsable de la répartition dans le 93, datée de janvier 2018) peuvent être considérés comme de vrais « candidats libres ». Il représentent historiquement environ 0,1% des candidats. Les élèves formés à titre onéreux par l’intermédiaire d’auto-écoles en ligne (disposant d’un agrément) sont de faux « candidats libres ». Il seront considérés comme des élèves de ces auto-écoles, pour l’attribution des places et pour le calcul des taux de réussite.
  • Candilib. Les organisations professionnelles ont obtenu que l’expérimentation ne soit poursuivie que dans deux départements (le 77 et le 93) au lieu des quatorze prévus initialement. Elles seront associées aux résultats de cette expérimentation. Enfin, il a été acté que les auto-écoles disposeront d’un accès professionnel à Candilib leur permettant de garder la main sur la gestion de leurs places d’examens pratiques (groupées et non pas individuelles). Les vrais candidats libres pourront ainsi utiliser Candilib pour demander leur place d’examen. Les auto-écoles (de proximité ou en ligne) devront passer par l’accès professionnel. L’ouverture du « Candilib Pro » aux plateformes devrait, en toute logique, conduire à une redéfinition de la méthode nationale d’attribution (MNA) des places d’examen.
  • L’agrément national. Ce point a été laissé en suspens. Le gouvernement attend la décision de la Cour de cassation qui ne devrait pas intervenir avant l’été.
  • Le code au SNU. Le contenu de la (très courte) formation au code de la route pendant le SNU a été confirmé. Les auto-écoles interviendront pendant le SNU, dans le cadre de la formation théorique de 4 heures. Une attention particulière sera portée à la plateforme internet qui sera proposée aux élèves pour réviser leur code de la route. Cette plateforme devrait être gérée par la DSR, en marque blanche. Ni les éditeurs, ni les plateformes ne disposeront des coordonnées des élèves.
  • Les contrôles. Les contrôles menés ces dernières semaines en Île-de-France pour traquer les faux moniteurs et le travail illégal devraient se poursuivre. En particulier les société de location de véhicules à doubles commandes fournissant des accompagnateurs rémunérés en espèces.

En parallèle, différentes solutions ont été abordées pour faire « baisser le prix du permis de conduire » :

  • La portabilité du CPF. Cette proposition consiste à permettre aux parents de céder à leurs enfants tout ou partie des heures de formations accumulées sur leurs compte personnels de formation (CPF). L’idée n’est pas nouvelles (nous vous en parlions il y a plusieurs mois déjà), elle semble aujourd’hui faire son chemin. Elle permettrait d’étendre la financement CPF à la majorité des élèves, alors qu’ils sont pour l’heure réservés aux élèves salariés ou en alternance.
  • Le recours accru aux simulateurs. Il s’agit de l’une des 23 propositions du rapport Dumas, cette proposition devrait être retenue. Les écoles de conduite pourront proposer à leurs élèves jusqu’à 10 heures de conduite sur simulateur, sur les 20 heures de conduite.

Dans ces conditions, les écoles de conduite disposant d’un simulateur devraient pouvoir proposer des tarifs compétitifs face aux plateformes. Une heure d’apprentissage sur simulateur n’étant pas aussi bénéfique qu’une heure de conduite en voiture, il n’est pas sûr que le volume total de leçons diminue, ni que que cette mesure soit bénéfique en terme de sécurité routière. Mais, après tout, la sécurité routière et la baisse de la mortalité ne figuraient pas parmi les objectifs visés par le rapport Dumas…

Au final, après avoir défendu des propositions très favorables aux plateformes, l’exécutif semble prendre conscience qu’il est allé trop loin et envisager des mesures plus équilibrées et plus justes. Plusieurs points restent en suspens, le lien de subordination des moniteurs indépendants et l’agrément national entre autres. Une très grande vigilance reste de mise!






Code au SNU: tout ça pour ça?

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Nous vous en parlions la semaine dernière, la formation au code de la route dans le cadre du SNU semble désormais actée. Une réunion se tenait mardi dernier au Ministère de l’Intérieur en présence des organisations professionnelles et des éditeurs de contenus pédagogiques. Cette réunion a été l’occasion d’en apprendre davantage sur ce qu’envisage la DSR au sujet de ce module « code de la route ». Il ressort de cette réunion une impréparation et méconnaissance de la pédagogie, qui risquent de coûter cher aux finances publiques et d’avoir un effet limité. Nous faisons le point.

À deux mois du lancement de l’expérimentation dans 13 départements pilotes, le temps presse pour finaliser le déroulement du SNU. Pour mémoire, une expérimentation aura lieu en juin 2019 auprès de 2 000 jeunes de 16 ans, tous volontaires, réunis au cours d’un « séjour de cohésion » d’une durée de 15 jours qui se déroulera en dehors de leur département d’origine. Ces élèves seront accueillis dans des lycées, casernes ou autres bâtiments administratifs susceptibles d’accueillir du public. Le SNU sera ensuite généralisé à toute une classe d’âge en 2022-2023.

Une « formation » au code baclée

Initialement fixée à deux jours, la « formation » au code de la route se déroulera finalement sur une journée de 8 heures, dont la moitié sera dédiée à un module de sensibilisation à la sécurité routière. Elle se déroulera par groupes de 30 élèves. En voici le programme détaillé.

Sensibilisation à la sécurité routière (4 heures)
  • Interventions orales réalisées par des pompiers, policiers, agents de la protection civile.
  • Étude de cas autour d’un accident (30-40 minutes).
Formation au code de la route (4 heures)
  • Explication du déroulement de l’examen (30 minutes) ;
  • Cours de code de la route (3 heures).
  • Bilan (20 minutes).

À l’issue de cette journée, les jeunes recevront un accès internet pour pouvoir continuer leur apprentissage (par eux-mêmes) sur une plateforme de révision, ainsi qu’un ticket leur donnant droit de passer l’examen dans le centre de leur choix.

Une expérimentation biaisée et irréaliste

Si l’on met de côté les 4 heures de sensibilisation à la sécurité routière, la formation au code de la route se fera sur 3 heures. Il sera matériellement impossible pour l’enseignant de passer en revue tous les thèmes du code de la route. Il sera également impossible pour les élèves de les assimiler.

Tous les professionnels le savent, l’apprentissage du code de la route prend entre quelques jours (pour les plus motivés) et quelques semaines. Ces 3 heures, seront donc davantage un « module de découverte » qu’une véritable formation.

Par ailleurs, l’expérimentation du SNU semble biaisée et ses résultats devront être regardés avec précaution. Ces jeunes volontaires, très motivés par l’expériences, ne seront probablement pas représentatifs de l’ensemble des futurs 15-25 ans qui se verront obligés d’effectuer ce séjour de 15 jours pendant les vacances scolaires.

Une hérésie en termes de pédagogie…

À l’issue du SNU, les jeunes vont donc se retrouver livrés à eux mêmes avec des accès internet valables un an et un ticket pour passer l’examen. Seule une infime partie d’élèves sur-motivés (et ayant des facilités) pourra obtenir son code de la route dans ces conditions. Pour l’immense majorité, ces avantages offerts seront peu ou mal utilisés et risquent de se traduire, le plus souvent par des échecs à l’ETG.

Pour les organisations professionnelles, cette mesure risque de faire baisser le nombre de formations en conduite accompagnée. En faisant croire aux jeunes (et à leurs parents) que le code leur serait « offert » pendant le SNU, nombre d’entre eux préféreront attendre le SNU (vers 16 ans) plutôt que d’opter pour l’AAC (dès 15 ans). Alors même qu’il est établi que les élèves optant pour l’AAC ont un taux de réussite supérieur à la moyenne et effectuent moins d’heures de conduite en auto-école.

Comme le résume, Lorenzo Lefebvre (élu au comité directeur du CNPA ESR) dans un article récent paru sur le blog de Mediapart : « Ce nouveau parcours de formation dissocie totalement la théorie de la pratique, et va l’inverse de toutes les théories de l’apprentissage. »

… et un gouffre financier pour l’État

En finançant un dispositif mal pensé, l’État va dépenser des sommes importantes pour des résultats limités. Côté dépenses, l’État devra payer :

  1. Les intervenants sur le module Sécurité routière ;
  2. Les enseignants de la conduite sur le module Code de la route ;
  3. Les accès internet ;
  4. Les tickets examen, fournis aux élèves.

Les enseignants de la conduite intervenant dans le cadre du SNU seront choisis au sein d’auto-école labellisées. Des appels d’offre seront passés localement. L’intérêt financier pour les écoles de conduite devrait être limité dans la mesure où, les auto-écoles devront tirer leurs tarifs vers le bas pour être retenues. Par ailleurs, les « séjours de cohésion » se déroulant dans un autre département que celui du lieu de résidence des élèves, les auto-écoles ne pourront donc pas espérer inscrire ces élèves pour la formation pratique.

La fourniture des accès internet relèvera d’appels d’offre qui devraient se faire au niveau départemental. La DSR souhaite associer les auto-écoles en ligne disposant de leur propre contenu pédagogique à ces appels d’offre. Dans ces conditions, il apparaît indispensable que :

  • la plateforme de révision du code de la route soit détenue et gérée par l’État ;
  • les sociétés remportant les appels d’offre aient interdiction d’en faire mention ;
  • ces mêmes sociétés n’aient pas accès aux données personnelles des élèves (ou que celles-ci soient anonymisées).

Si ces conditions n’étaient pas strictement remplies, les données personnelles des élèves pourraient être réutilisées à des fins commerciales. Cela constituerait une entorse grave à la concurrence entre auto-écoles.

En ce qui concerne les tickets examen, il se pourrait là aussi que les sommes dépensées n’aient que peu de résultats. Lorenzo Lefebvre ajoute : « la majorité des jeunes qui prévoient de passer le permis de conduire, par le parcours classique, à 18 ans, vont, soit ne pas passer l’examen alors que le contribuable aura financé leur formation, soit passer l’examen mais devoir participer a plus d’heures de conduite afin de travailler les règles du code de la route apprises deux ans auparavant (les heures de conduite coûtent beaucoup plus que les heures de théorie), soit tenter le passage de l’examen sans s’assurer d’avoir le niveau, ils miseront sur la chance pour profiter de ce cadeau gracieusement distribué et échoueront logiquement. »

Au final, la promesse gouvernementale de faire passer le code de la route pendant le Service national universel semble avant tout dictée par des visées électorale. Cette mesure ne permettra ni de former efficacement les élèves au code de la route ni même de faire baisser le prix de la formation au permis de conduire. Elle se traduira par un surcoût pour les finances publiques… et donc pour l’ensemble des citoyens.